« Auparavant, je devais me rendre à Tbilissi pour faire réparer mes dispositifs », explique Guladi, 46 ans, amputé et joueur de football à Zugdidi. « Mes prothèses et mes béquilles sont importantes pour que je puisse être visible dans la société. C’est une façon pour nous de laisser notre marque et d’être actifs. »
Jusqu’à récemment, des milliers de Géorgiens n’avaient pas accès à des dispositifs essentiels comme les fauteuils roulants, les appareils auditifs et les aides à la marche. Aujourd’hui, le pays intègre les technologies d’assistance (TA) directement dans les systèmes de santé, transformant ainsi l’accès des personnes handicapées et celles ayant des limitations fonctionnelles dans le pays, en particulier dans les zones rurales.
Soutenu par l’OMS et ATscale, le Partenariat mondial pour les technologies d’assistance, ce modèle fondé sur une approche systémique constitue une étape majeure vers la création d’un écosystème complet de TA, garantissant la disponibilité des produits, la préparation du personnel, la prestation des services ainsi que les politiques habilitantes associées.
Élargir le programme national
Les données de l’OMS pour 2021 ont révélé des besoins non satisfaits considérables en Géorgie : 33 300 fauteuils roulants, 62 900 appareils auditifs et 25 900 produits de mobilité. Or, ce fossé commence à se combler à mesure que la fourniture de TA est intégrée au système national de santé, au lieu d’être assurée par le biais de canaux distincts et fragmentés.
La transformation a commencé en 2021 lorsque la Géorgie a adopté une liste nationale des produits et aides techniques prioritaires, alignée sur la Liste mondiale des produits et aides techniques prioritaires de l’OMS. Cela a fait évoluer les achats, passant de décisions ponctuelles à une stratégie guidée au niveau national.
Avec le soutien de l’OMS et d’ATscale, la Géorgie a étendu sa couverture financée par l’État de 13 produits en 2022 à 24 en 2024, y compris les aides à la mobilité, les prothèses et les orthèses, les appareils auditifs et visuels et les produits d’autosoins. Les autorités envisagent également d’ajouter des technologies de pointe, telles que des montres parlantes et des lecteurs DAISY.
Des projets pilotes menés dans les régions de Samegrelo et d’Adjara donnent déjà des résultats. Les centres de soins de santé primaires locaux servent désormais de points d’accès pour les fauteuils roulants, les aides à la marche et les produits d’autosoins. Des prestataires de première ligne formés à cet effet identifient les besoins, prescrivent les dispositifs et accompagnent les bénéficiaires dans leur bon maniement, une innovation cruciale pour les communautés rurales.
Des services adaptés aux besoins des utilisateurs
L’engagement financier du gouvernement en faveur des TA s’est considérablement accru. Le budget de l’État est passé de 5,5 millions de GEL (2,1 millions d’USD) en 2023 à 8,5 millions de GEL (3 millions d’USD) prévu en 2025, soit une augmentation de 55 % en seulement 2 ans.
Ces fonds couvrent désormais entièrement les fauteuils roulants pédiatriques et électriques ainsi que les aides auditives, tandis que les utilisateurs adultes de fauteuils roulants manuels ne paient qu’une petite contribution. Les lunettes ne sont pas encore incluses, mais un rapport soutenu par l’OMS recommande vivement leur inclusion à l’avenir. Le pays a également introduit un budget gouvernemental pour payer les frais de consultation pour chaque utilisateur de TA assisté par un prestataire de soins de santé primaires, une incitation à garantir des soins personnalisés et basés sur l’évaluation.
Les réformes ont permis de combler des lacunes de longue date en matière de prestation de services. Auparavant, les patients amputés n’étaient pas orientés vers des services de prothèses et d’orthèses. L’OMS a par conséquent collaboré avec des spécialistes nationaux pour mettre en place un système d’orientation-recours structuré, garantissant la continuité des soins et une réadaptation adéquate.
Ces progrès marquent un virage vers une conception centrée sur l’utilisateur, c’est-à-dire l’instauration de services adaptés aux besoins individuels et non aux structures institutionnelles.
Vers un avenir inclusif
Les efforts de la Géorgie montrent comment le modèle de l’OMS, ancré dans la réforme des politiques, l’intégration des systèmes de santé, le financement durable et les services centrés sur l’utilisateur, peut transformer des vies. La convergence de nouvelles politiques, de budgets élargis et de partenariats innovants ouvre la voie à un avenir où les TA ne sont plus un privilège mais un droit.
« Plus qu’une réforme politique, il s’agit d’indépendance et de dignité », explique Silviu Domente, représentant de l’OMS et chef du bureau de pays de l’OMS en Géorgie. « Une fois de plus, la Géorgie prend des mesures audacieuses pour adopter des approches innovantes, prouvant ainsi que les technologies d’assistance ont leur place au cœur de chaque système de santé. »

